Angèle Guerre

Née en 1988, Angèle Guerre vit et travaille à Paris. Elle développe une pratique du dessin et de l’installation en explorant diverses façons d’entamer la surface. Qu’il s’agisse de gratter derrière un miroir ancien ou d’inciser le papier, l’objectif est de rendre visible une matière et d’en produire un autre espace. C’est une pellicule qui s’effrite, une protection qui s’efface, une peau qui se gonfle et une sensation qui est suggérée. 

Elle interroge la mémoire des textures et du motif, le rythme, la pulsation, la répétition. Elle laisse ainsi mes compositions se créer, par un lent déphasage. 

Quoiqu’il arrive, un dessin va prendre du temps, et ce temps-là est non seulement précieux mais nécessaire. C’est un temps géologique. C’est le temps dont a eu besoin le monde pour se façonner. L’accélération aujourd’hui est partout, omnipotente. Le dessin reste donc un acte en réaction, la reproduction d’un geste ancien.

C’est à l’image du monde du vivant que ses dessins peuvent se percevoir. De près : c’est fragmentaire, un foisonnement microscopique, un poil de complexité. Puis de loin : un tout unifié, un ensemble cohérent et organiquement structuré. La pratique du dessin, ainsi longue et méditative, permet de composer des espaces très dynamiques. L’agitation prend forme à partir d’un geste lent, c’est là toute la belle ambivalence du dessin.

Les outils sont la conséquence de cette lenteur : rotring, incisions au scalpel ou sur cuir, travail à la plume, au feutre de calligraphie. Ces instruments impactent le travail par l’exiguïté de leurs empreintes. Alors, pour que ces marques deviennent marquantes, elle les accumule, les fusionne, les tisse et les brode sur papier ou dans l’espace. En les densifiant, elles deviennent peau et texture. Dans ses dessins et ses installations, rien n’est vrai. Aucune perspective, aucun horizon n’existe, et pourtant, ils sont composés de paysages vécus.

Dans le travail avec le scalpel et le cuir, c’est un autre mécanisme qui se met en place : celui de reproduire instinctivement des gestes immémoriaux. C’est la peau d’une bête tendue qu’on dépèce, qu’on met en pièce. Tailler, couper dans la masse, piquer, ce sont aussi des gestes de couturière, de relieur ou de boucher : un travail de manutention précis, celui de l’écrivain aussi.

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